La « Loi Climat et Résilience », appelée aussi « Loi Climat », a pour objectif la lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets. La Loi n°2021-1104 du 22 août 2021 concerne de nombreux domaines comme l’alimentation, les transports, la publicité etc. Mais dans cet article nous allons surtout parler de l’impact de cette loi sur le secteur immobilier et plus particulièrement celui de la location.
Loi Climat et Résilience : Quel impact sur l’immobilier ?
Dans le secteur immobilier, l’objectif principal de la Loi Climat est la lutte contre les « passoires énergétiques », appelées également « passoires thermiques ». Il s’agit de mesures obligatoires en vue de réduire le nombre de logements énergivores en plusieurs étapes. Certaines mesures sont déjà en vigueur, pour d’autres, un calendrier est fixé pour les dix prochaines années. Il faut s’attendre à la mise en place de nouveaux calendriers dans les années à venir, car l’objectif final est d’« atteindre la neutralité carbone » et « un parc de logements de niveau basse consommation en moyenne d’ici à 2050 ».
Conséquences pour les bailleurs
Les propriétaires bailleurs sont particulièrement concernés par ces mesures obligatoires car la loi impose le gel des loyers des passoires thermiques depuis le 24 août 2022 et l’interdiction progressive de mise en location des ces logements à compter du 1 er janvier 2023.
Gel des loyers des passoires thermiques
Depuis le 24 août 2022, les loyers des logements dont le diagnostic de performance énergétique (DPE) est classé F ou G ne peuvent plus être augmentés. Le gel des loyers concerne aussi bien les logements nus que les meublés, les logements du parc privé comme du parc social. Ce blocage s’applique aux nouveaux contrats ainsi qu’aux contrats en cours qui ont été tacitement reconduits ou renouvelés depuis le 24 août 2022. La sortie d’un logement de son statut de « passoire thermique » n’est possible qu’après la réalisation de travaux de rénovation énergétique suivi de la réalisation d’un nouveau DPE (classé E a minima). Les locations saisonnières (les meublés de tourisme) ne sont pas soumises à ces dispositions pour le moment. En outre-mer, le blocage du prix des loyers ne s’appliquera qu’à partir du 1er juillet 2024.
Calendrier des interdictions de mise en location
Depuis le 1er janvier 2023, le logement doit être énergiquement décent pour pouvoir être mis en location. Le Décret n° 2021-19 du 11 janvier 2021 précise que « le logement est ainsi qualifié d'énergétiquement décent lorsque sa consommation exprimée en énergie finale par mètre carré et par an est inférieure à 450 kWh/m².an en France métropolitaine ». Ainsi, tout logement dont la performance énergétique est supérieure ou égale à ce plafond est désormais interdit à la location.
Ce plafond de 450 kWh/m².an correspond au plafond inférieur de la classe G de l’ancien classement DPE qui a été revu à la baisse depuis juillet 2021 (420 kWh/m².an). Pour distinguer ces logements particulièrement énergivores des autres logements de la classe G non concernés par l’interdiction à ce jour, la notion de classe G+ a été ajoutée de manière non officielle aux nouvelles étiquettes DPE. Il faut également préciser que cette interdiction de mise en location ne s'applique qu'aux nouveaux contrats de location conclus à compter du 1er janvier 2023. Les contrats en cours ne sont pas concernés.
Dans les années à venir, ces interdictions concerneront progressivement d’autres logements en France métropolitaine :
- À partir de 2025 : interdiction de mise en location des logements classés G.
- À partir de 2028 : interdiction de mise en location des logements classés F.
- À partir de 2034 : interdiction de mise en location des logements classés E.
Le calendrier des interdictions de mise en location est différent dans les départements d’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte). Les logements classés G seront interdits à partir du 1er janvier 2028, et les logements classés F à partir du 1er janvier 2034. Ce calendrier ne prévoit pas d’échéance pour les logements classés E dans l’immédiat.
En résumé, la décence énergétique du logement est déterminée par le DPE, ce fameux document dont les étiquettes multicolores décorent les vitrines des agences immobilières depuis plusieurs années.
DPE : quoi de neuf ?
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est un document obligatoire pour une mise en location ou une vente. Il renseigne sur la performance énergétique et climatique d’un logement ou d’un bâtiment (étiquettes A à G), en évaluant sa consommation d'énergie primaire (CEP) et ses taux d'émission de gaz à effet de serre (EGES).
Le DPE a connu des modifications importantes en 2021. La méthode de calcul a été révisée et la présentation du document a été revue pour faciliter sa lecture. La nouvelle méthode de calcul utilise des « double-seuils » pour évaluer la performance énergétique d’un logement. C’est donc en fonction de la quantité mais aussi la propreté de l’énergie consommée, qu’un logement est désormais classé.
Vous avez ci-dessous deux présentations différentes de ce classement (source : « Guide DPE logements »* du Ministère de la Transition écologique, page 29)
Pour les logements situés à plus de 800 mètres d'altitude, le classement est différent pour les étiquettes E, F et G. Il y a ainsi une tolérance due au fait que ces logements de haute montagne ont besoin de plus d'énergie pour chauffer. Vous trouverez ces seuils dans le même « Guide DPE logements ».
D’après ces tableaux, on comprend que si l’une des deux étiquettes CEP (consommation d’énergie primaire) ou EGES (émissions de gaz à effet de serre) est classée plus haut que l’autre, le classement de votre logement correspondra à la valeur la plus élevée. Par exemple, votre CEP est classé E à 320 kWh/m².an, tandis que le classement EGES est de 75 kg CO2/m2.an ce qui correspond à la classe F, votre logement est classé F.
Attention aux classements donnés sur certains sites. De nombreux tableaux ne comportent que les valeurs de consommation d’énergie primaire (CEP), d’autres ne tiennent pas compte des signes plus et égal (≥) ou moins et égal (≤) et intègrent les seuils entre chaque classe sur les mauvaises lignes. Un logement avec une CEP à 420 kWh/m2.an est donc souvent classé F sur ces tableaux alors qu’il sera considéré comme G par un diagnostiqueur. Il est donc important de toujours se référer au document établi par un professionnel.
Les nouveaux DPE sont valables 10 ans et est ils sont désormais opposables.
Dates de validité des anciens DPE
Qu’en est-il des anciens DPE dont la validité initiale était également de 10 ans ?
La durée de validité d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) dépend de sa date de réalisation. Les DPE établis avant le 1er janvier 2018 ne sont plus valables depuis le 1er janvier 2023. Les DPE établis entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 sont valables jusqu’au 31 décembre 2024.
Bon à savoir :
Le seul seuil qui n’a pas subit de modification sur les nouveaux DPE est le seuil inférieur de la classe F (330 kWh/m².an) qui reste identique à celui des anciens DPE. C’est donc le seuil à partir duquel le logement est considéré comme « passoire thermique ». Ce n’est pas précisé dans les textes de loi ni d’autres jurisprudences, mais ce seuil a sans doute été conservé pour permettre d’appliquer le terme de « passoire thermique » aux classes F et G quel que soit le DPE (nouveau ou ancien).
DPE opposable : ce qu’il faut savoir
Depuis le 1er juillet 2021, le DPE est devenu opposable au même titre que les autres diagnostics immobiliers. Cela signifie qu’en cas d’erreur, la responsabilité du vendeur ou du bailleur peut être engagée par l’acquéreur ou par le locataire qui a subi un préjudice. Ces derniers peuvent faire réaliser un nouveau diagnostic et demander une compensation en cas d’écart important (une baisse du loyer ou du prix de vente, par exemple).
Les bailleurs et les vendeurs ont également le droit de se retourner contre l’entreprise qui a réalisé le diagnostic erroné. Le responsable de l’erreur pourrait être sanctionné par un tribunal.
Obligation d’affichage
L’affichage de la performance énergétique dans les annonces immobilières est obligatoire depuis le 1er janvier 2011.
Depuis le 1er janvier 2021, chaque annonce de mise en vente ou en location doit mentionner a minima les lettres correspondant aux échelles de classement énergétique et climatique. Pour les classe F et G, il est également obligatoire d’ajouter la mention « logement à consommation énergétique excessive ».
Depuis le 1er janvier 2022, il est également obligatoire de mentionner explicitement l’estimation de la facture énergétique annuelle théorique du logement, sous forme de fourchette.
Ces obligations concernent les annonces sur tous les supports : sites internet, presse, locaux des professionnels. Elles s’appliquent également aux annonces rédigées par des particuliers.
Des sanctions sont prévues en cas de non-respect de ces obligations :
- Un professionnel est passible d’une amende administrative allant jusqu’à 3000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale.
- Un non-professionnel est passible d’une amende administrative allant jusqu’à 3000 €.
Pourquoi la loi "Climat et Résilience" est-elle critiquée ?
La loi « Climat et Résilience » de 2021 vise à accélérer la transition écologique en France. Cependant, elle fait l’objet de nombreuses critiques. Certains estiment que cette loi ne va pas assez loin pour atteindre les objectifs climatiques fixés. D’autres soulignent ses effets négatifs socioéconomiques.
En ce qui concerne le secteur immobilier, en date du 31 août 2023, La Fédération Nationale de l’Immobilier (FNAIM) a publié un communiqué de presse pour alerter sur les tentions sur le marché locatifs et la pénurie de logements. Ils estiment à - 34% la baisse de biens mis en location cet été par rapport à la même période en 2022. En parallèle, ils constatent une forte augmentation de la demande.
Vous pouvez lire le communiqué de presse ici
De son côté, L’Union des Syndicat de l’Immobilier (UNIS) confirme que la France connaît une crise majeure et multifactorielle du logement et envisage le dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le décret « décence énergétique » de la loi climat et résilience.
Des solutions d’aide et d’accompagnement sont proposées par l'État pour assister les propriétaires bailleurs dans la réalisation des travaux de rénovation énergétique, mais ces solutions sont également jugées insuffisantes par les grandes organisations du secteur. Nous vous proposerons un autre article pour développer ce point.
Conclusion
Bien que la loi Climat et Résilience est supposée permettre à chacun de vivre dans un logement décent et de contribuer ainsi aux problématiques climatiques, sa mise en œuvre semble être extrêmement complexe.
Les professionnels de l’immobilier et les particuliers doivent faire face à de nombreuses nouvelles contraintes pour se conformer à la loi. Tout cela freine de plus en plus l’investissement locatif en déséquilibrant davantage l’offre et la demande des biens locatifs à une période où la pénurie du logement est déjà assez forte.
Nous saluons l’engagement des grandes organisations du secteur et espérons que les pouvoirs publics proposeront rapidement des solutions de sortie de cette crise du logement.
Vous êtes propriétaire et avez des questions concernant les dispositions de la loi Climat et Résilience ? N’hésitez pas à nous contacter.